Observatoire du nucléaire - Communiqué du 31 mars 2011


 
Abandon de tout moratoire sur le réacteur EPR :
Pressions politiques au plus haut niveau de
l'Etat
sur l'Autorité de sûreté nucléaire

 

Alors que M. Sarkozy est au Japon pour promouvoir le réacteur français EPR, il était hors de question que l'ASN maintienne son idée de moratoire sur l'EPR !

 

Hier mercredi 30 mars 2011, le Directeur de l'Autorité de sûreté nucléaire, André-Claude Lacoste, auditionné à l'Assemblée nationale, déclarait "Je pense que si la question d'un moratoire se pose, et nous nous la posons, ce sera sur la construction de Flamanville 3" (cf http://bit.ly/ftWQ2k ), c'est à dire sur le réacteur EPR actuellement en chantier.

Or, ce matin, interviewé par France-info, M. Lacoste a clairement fait machine arrière en réfutant le terme de moratoire qu'il avait pourtant lui-même utilisé la veille ! Que s'est-il donc passé entre temps ?

 

C'est bien simple : aujoud'hui même, M. Sarkozy est au Japon où il tente de profiter de la catastrophe nucléaire en cours pour promouvoir le réacteur français EPR (cf http://bit.ly/hAFpcI ), prétendant contre toute évidence qu'il serait plus sûr que d'autres réacteurs.

Il est clair que cette cynique instrumentalisation de la catastrophe de Fukushima serait tombée à plat en cas de moratoire décrété en France sur le réacteur EPR. Pour l'Observatoire du nucléaire, il est évident que des pressions politiques au plus haut niveau de l'Etat se sont exercées entre hier et aujourd'hui sur l'ASN dont la supposée "indépendance" n'existe absolument pas en réalité.

 

En effet, ces derniers jours, pour attester de cette dite "indépendance" de l'ASN, des personnes ont cité la mise en cause l'an dernier du "contrôle-commande" de l'EPR conjointement par trois autorités de sûreté dont la française (cf communiqué commun du 2 novembre 2009 : http://bit.ly/31abcO ). Or, en réalité, c'est l'autorité de sûreté britannique qui a levé le lièvre (cf The Times du 1er juillet 2009 : http://bit.ly/PB5k2 ). L'ASN française, elle, n'avait rien vu (il s'agirait alors d'une très grave incompétence) ou rien dit.

Par ailleurs, la loi de 2006 sur la transparence est mise en avant parce qu'elle a donné, sur le papier, l'indépendance à l'ASN. Mais M. Lacoste était directeur de la sûreté nucléaire depuis 1993 : serait-il devenu indépendant miraculeusement en 2006 ? Il est permis d'en douter, d'autant qu'il est un pur produit de l'Ecole des Mines d'où sont sortis tous les acteurs de l'industrie nucléaire française.

D'autre part, la direction (ou "collège") de l'ASN comprend des personnes comme M. Philippe Jamet dont la dépendance vis à vis du lobby nucléaire est établie puisqu'il a effectué l'essentiel de sa carrière (cf http://bit.ly/eJLjAp ) au Commissariat à l'énergie atomique (CEA), puis à l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) dont une des missions principales est le développement de l'énergie nucléaire sur la planète.

Mieux, ou pire : M. Jamet était le chef de la délégation de l'AIEA (cf http://bit.ly/f5cIkb ) chargée de tirer les enseignements du séisme du 16 juillet 2007 qui a gravement endommagé la centrale nucléaire de Kashiwasaki au Japon. Les préconisations de M Jamet ont été bien mièvres, et bien peu gênantes pour TEPCO (l'EDF japonais) puisque, 3 ans plus tard, on se retrouve en plein drame nucléaire suite à... un séisme au Japon !

L'Observatoire du nucléaire réaffirme donc que l'ASN n'est aucunement indépendant de l'industrie nucléaire et du pouvoir politique français et que, de fait, l'audit des centrales françaises, annoncé le 24 mars par le premier ministre François Fillon, est un subterfuge dont le résultat est connu à l'avance : l'ASN annoncera que les centrales françaises sont "sûres" et peuvent continuer à fonctionner (moyennant peut-être quelques aménagements peu dérangeants pour EDF).

A ce sujet, il apparait que, au niveau européen, l'ASN française pèse de tout son poids (cf http://bloom.bg/gp17Ax ) pour empêcher, lors des "stress tests" à venir, la prise en compte du risque "chute d'avion" qui, pourtant, est un des plus graves dangers pesant sur les installations nucléaires. Il est vrai qu'aucun réacteur français n'est conçu pour résister à la chute d'un avion de ligne, ni les réacteurs actuels, ni l'EPR...


Observatoire du nucléaire