Observatoire du nucléaire - Communiqué du lundi 25 mars 2013


Don de 35 millions au Niger : l'Observatoire du
nucléaire accuse Areva de réécrire l'histoire

 
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Areva au Niger : un PILLAGE durable (depuis 50 ans)...

Vendredi 8 mars 2013, interrogé sur la télévision publique du Niger, Olivier Wantz, directeur général adjoint d'Areva chargé de l'activité minière, a livré aux Nigériens une véritable réécriture de l'affaire du "don" d'Areva. C'est effectivement ce qui ressort de la lecture de la dépêche AFP du 9 mars 2013 (8h31), titrée "Areva offre 35 millions EUR au Niger pour sécuriser ses sites d'uranium", et qui relate les propos de M. Wantz.

Cette réécriture des faits, totalement contredite par de nombreux éléments, vise à présenter une version plus acceptable par l'opinion nigérienne... et à mettre Areva dans une position moins inconfortable dans l'optique du procès que la multinationale à lancé contre l'Observatoire du nucléaire et qui se tiendra le 20 décembre 2013 au Tribunal de grande instance de Paris.

Pour mémoire, le 11 décembre 2012, par communiqué, l'Observatoire du nucléaire a accusé Areva de s'être livrée à "une manoeuvre de corruption, probablement sur le plan légal et assurément sur le plan moral", du fait du versement d'un curieux "don" au budget du Niger, d'un montant de 26 millions d'euros (en deux "tranches" : 16 millions d'euros pour 2013, 10 millions pour 2014 ), mais finalement de 35 millions d'euros avec une troisième "tranche" de 9 millions pour 2015.
 
L'Observatoire du nucléaire a aussi affirmé que la somme versée allait servir en partie à l'achat d'un nouvel avion pour le Président du Niger, Mahamadou Issoufou, qui est par ailleurs un ancien cadre d'Areva. Mais l'utilisation finale de cet argent est en fin de compte secondaire : c'est le versement en lui-même, et sa "justification", qui est au cœur du problème.
 
Le lendemain, dans la dépêche AFP du 12 décembre 2012, Zakari Oumarou, président du groupe parlementaire du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNSD, au pouvoir), reconnaissait l'existence de ce don : "Areva a accordé au Niger une aide budgétaire sans conditions et non ciblée de 17 milliards FCFA (environ 26 millions d'euros)"
 
Pourtant, toujours d'après l'AFP, "le groupe nucléaire français, qui exploite depuis des décennies l'uranium dans le nord du pays, a démenti le versement d'une aide budgétaire qui suscite la polémique." Dénonçant une "diffamation", Areva a alors assigné en justice l'Observatoire du nucléaire.
 
Malgré les dénégations d'Areva, dans une dépêche AFP du 13 janvier 2013, les autorités nigériennes ont à nouveau confirmé la réalité du "don", mais aussi évoqué sa "justification" : «"Prenant en compte le manque à gagner généré par le report de l'exploitation d'Imouraren, Areva s'engage à soutenir financièrement l'Etat du Niger en mettant à sa disposition 35 millions d'euros", a affirmé Hassoumi Massaoudou, le directeur de cabinet du président nigérien ».
 
Mieux : le 14 janvier 2013, l'Observatoire du nucléaire a rendu public le compte-rendu confidentiel (*) d'une rencontre qui a eu lieu le 9 novembre 2012 à Paris entre M. Hassoumi Massaoudou et trois hauts dirigeants d'Areva... dont Olivier Wantz.  La conclusion de ce document est explicite :

"Considérant la résolution prochaine des différents points évoqués dans ce compte-rendu ainsi que la poursuite d'une coopération sereine entre l'État du Niger et AREVA et prenant en compte le manque à gagner généré par le report probable du projet Imouraren au-delà de 2014, AREVA s'engage à soutenir financièrement l'État du Niger en mettant à sa disposition la somme de trente-cinq millions d'Euros sous la forme de paiements successifs de seize millions d'Euros en 2013, dix millions d'Euros en 2014 et neuf millions d'Euros en 2015."

Notons que l'authenticité de ce document est certaine puisque, lors d'une conférence de presse qu'il a tenue le samedi 12 janvier (**), M. Massaoudou, le directeur de cabinet du président nigérien, s'est élevé contre la publication de ce document, mais sans en contester l'authenticité, bien au contraire... puisqu'il a tenté de s'expliquer sur son contenu.
 
La lecture attentive du document en question montre que les "différents points évoqués dans ce compte-rendu" concernent le marché mondial et les prix de l'uranium, les caractéristiques matérielles et géologiques du projet d'Imouraren, les priorités politiques du Président du Niger (qui a besoin que la mine soit ouverte… avant l'élection présidentielle de 2016 !), etc, mais à aucun moment il n'est question de danger terroriste, de risques d'enlèvement, ni même des salariés d'Areva otages depuis 2010.
 
Or, l'AFP en fait état dans sa dépêche du 9 mars 2013, Areva - qui n'ose plus démentir l'existence même du "don" - prétend subitement, par la voix d'Olivier Wantz, "avoir offert 35 millions d'euros au Niger pour l'aider à sécuriser ses sites d'uranium, démentant que ce don soit destiné à compenser le retard dans l'exploitation de la mine géante d'Imouraren." M. Wantz semble donc avoir "oublié" ce qui a été dit - y compris par lui-même ! - lors de la rencontre confidentielle du 9 novembre 2012 à Paris.

Areva tente aujourd'hui de réécrire l'histoire parce que, face à l'opinion, il est plus présentable de verser une somme pour "sécuriser" une activité industrielle que pour "amadouer" les dirigeants d'un Etat qui est clairement spolié. Avec cette nouvelle version, Areva tente aussi de "prouver" que les accusations de l'Observatoire du nucléaire sont "diffamatoires".

Il serait pourtant totalement légitime que le Niger reçoive de l'argent de la part de la France, si cela relevait d'une augmentation du prix de l'uranium et de taxes que le Niger appliquerait à Areva, pour rattraper le "manque à gagner" causé par 50 ans de véritable pillage et pour réparer autant que faire se peut les dommages environnementaux causés par la multinationale de l'atome.
 
Mais il est insupportable de voir Areva attribuer une somme au Niger, comme un "généreux donateur" venant au secours d'un déshérité, d'autant que cette somme est dérisoire comparée aux profits réalisés depuis 50 ans par Areva au détriment du Niger.
 
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(*) Lire le document ici : http://observ.nucleaire.free.fr/reunion-confidentielle-areva-niger.pdf   
(**) Lire le compte-rendu de cette Conférence de presse : http://bit.ly/10AZRWK

 


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